Le salaire : un argument de poids
Qu’est-ce qui rend un job attractif ? Est-ce l’intérêt de la mission, l’équipe, les perspectives d’évolution, la flexibilité… ou tout simplement le salaire ? La question revient inlassablement au cœur de nos réflexions professionnelles. Car même si l’on aime croire que d’autres facteurs priment, la rémunération reste un élément central dans notre rapport au travail. C’est d’ailleurs la base du « contrat » : on échange son temps, son expertise, son énergie contre un montant, une reconnaissance chiffrée qui nous semble appropriée. Cela semble simple, et pourtant, le sujet demeure, encore et toujours, délicat à aborder.
Les écarts qui interrogent
Ce qui, bien souvent, dérange, ce n’est pas tant l’idée de rémunération en soi que l’écart entre les salaires. L’amplitude des différences peut choquer et rendre la discussion sensible. Le débat sur la limitation des hauts salaires refait ainsi régulièrement surface en Suisse ; une motion a d’ailleurs été récemment acceptée par le Conseil des États visant, notamment, le salaire de Sergio Ermotti, patron d’UBS, à la suite de la reprise de Crédit Suisse. Ce sujet n’est pas nouveau, mais il prend une résonance particulière dans un pays où les rémunérations dans certains secteurs atteignent parfois des hauteurs stratosphériques. Que rémunère-t-on, au fond ? Le niveau de responsabilité ? La prise de risque ? La performance ? Le statut ?
Nous vous avons posé la question dans l’un de nos sondages LinkedIn : faut-il, oui ou non, limiter les hauts salaires ? Seuls 18 % des répondants se sont montrés favorables à une limitation stricte. Ce chiffre grimpe à 33 % lorsqu’il s’agit d’organisations publiques. Cette différence est significative. Elle reflète une constante dans la culture suisse, de tradition plutôt libérale : ce qui relève du secteur privé doit rester de l’ordre du privé. Liberté de gestion, autonomie contractuelle, responsabilité individuelle sont des piliers de l’univers entrepreneurial. En revanche, dès lors qu’il s’agit de fonds publics, la question de la transparence, de la mesure – voire de l’exemplarité – devient incontournable.
Et la génération Z dans tout ça ?
On dit souvent que la génération Z cherche avant tout du sens, de la flexibilité, un bon équilibre vie pro/vie perso… mais est-ce vraiment au détriment du salaire ? Les études montrent que si cette nouvelle génération accorde effectivement de l’importance aux conditions de travail, à la mission ou aux valeurs d’une entreprise, elle ne néglige pas pour autant la rémunération. C’est d’ailleurs la génération qui serait la plus prospère financièrement, à la même phase de vie que leurs ainés. Dans un contexte économique incertain, la rémunération redevient en outre un facteur central dans les décisions de carrière.
Le poids du secteur
Un facteur déterminant, et pourtant souvent sous-estimé, est le secteur d’activité (voir notre dernier post LinkedIn à ce sujet). À poste équivalent, les écarts peuvent être considérables. Un communicant, avec le même niveau de responsabilité, peut gagner du simple au double selon qu’il travaille pour une ONG ou pour une banque. Le choix du secteur influence donc directement les prétentions salariales, mais aussi les attentes lors du recrutement. Il rend également certaines reconversions plus complexes : quitter un secteur très rémunérateur, comme le négoce ou la finance, pour un environnement plus engagé mais moins bien payé peut générer des désillusions, voire des renoncements.
Une autre logique dans le secteur public
Dans le public, la logique est encore différente. On n’y travaille pas – en règle générale – pour maximiser les revenus, mais pour contribuer à une mission d’intérêt général. L’utilité sociale et la notion de service y sont – théoriquement – moteurs. Les grilles salariales sont publiques, les progressions encadrées, ce qui implique davantage de transparence et moins de latitude individuelle. Cela ne signifie pas pour autant que la question salariale soit secondaire. Pour attirer et fidéliser les talents, les employeurs publics doivent rester compétitifs avec les autres secteurs… Car même si la mission y est différente, la charge de travail, les responsabilités et les pressions peuvent être souvent similaires à celles rencontrées dans le privé.
L’argent comme révélateur
Notre rapport à l’argent dit beaucoup de notre rapport au travail. Il révèle notre système de valeurs, notre quête de sens, de reconnaissance. Il éclaire aussi nos contradictions : entre envie de liberté et besoin de sécurité, entre idéal de contribution et besoins matériels. Il est nécessaire de s’interroger sur la place que l’argent a dans notre vie, de mettre au clair nos besoins et priorités, afin d’être en mesure de mieux définir nos choix professionnels pour dessiner la carrière à laquelle nous aspirons vraiment.
SAVOIR NÉGOCIER SON SALAIRE
Lors d’un recrutement, la question du salaire est souvent redoutée par les candidats. L’aborder avec crainte, gêne ou sans préparation peut péjorer l’impression donnée au recruteur. Notre conseil : préparez-vous. Une négociation salariale ne s’improvise pas. Elle commence par se renseigner sur le secteur, les pratiques de l’organisation, les standards du poste visé. Ensuite, il est important d’arriver avec une fourchette réaliste de salaire. La base de la fourchette doit correspondre à ce que vous jugez juste et acceptable pour vous, pas votre absolu minimum.
En cas de changement de poste, une augmentation de 10 à 20 % est généralement envisageable. Aller au-delà peut se justifier si les responsabilités augmentent fortement. À ne pas négliger : les conditions cadres. Elles peuvent être un vrai levier de négociation : flexibilité, formation, congés supplémentaires, LPP… La rémunération totale va en effet bien au-delà du chiffre brut.
Enfin, un dernier mot sur la transparence : même si l’on choisit de ne pas divulguer son niveau de salaire actuel ou passé, le gonfler pour justifier ses nouvelles prétentions est tout sauf une bonne idée. Une négociation réussie repose avant tout sur la confiance : mentir sur son salaire actuel en entretien ne fait définitivement pas partir sur de bonnes bases.