POURQUOI LE TEMPS NOUS ÉCHAPPE
Trois grandes causes reviennent régulièrement lorsque l’on s’interroge sur son manque de temps : les demandes extérieures (sollicitations, obligations, interruptions), l’absence de procédures claires ou d’outils adaptés et enfin notre propre fonctionnement (difficulté à dire non, la tendance à tout accepter, les fameux « People Pleasers »).
De notre expérience auprès de nos clients, ce qui manque le plus n’est en général pas le « temps de production », mais celui de la réflexion, de la cohésion, du management… Et le temps pour juste souffler entre deux séances. Avoir le sentiment de se réapproprier son temps, et donc son rythme, agit également au niveau des valeurs qui s’ancrent ainsi de manière concrète dans notre quotidien au travail : responsabilité, confiance, respect, envers soi-même et les autres.
ROSSIGNOL OU HIBOU ?
C’est la question que nous vous avions posée dans un récent sondage : pour 45 % d’entre vous, la préférence va au matin, pour 13 %, au soir et pour 34 %, cela dépend des urgences ou du contexte. Pourtant, selon un autre de nos sondages, près d’un tiers d’entre vous est amené à rouvrir fréquemment son ordinateur après la journée « régulière » de travail. Autrement dit : nos préférences existent bel et bien, mais la réalité du quotidien ne cesse de les bousculer.

AJUSTER SON RYTHME : UN EFFORT RÉCIPROQUE
La difficulté n’est pas seulement de connaître son rythme, mais de faire en sorte qu’il puisse s’ajuster à celui de l’organisation. Or, ce n’est de loin pas toujours possible : tout dépend du rôle et des fonctions que l’on y occupe. Un chef d’équipe qui fonctionne en décalage complet avec ses collaborateurs pourra difficilement assurer le job efficacement sur la durée. Comment superviser correctement si l’on n’est pas suffisamment en contact avec son équipe ? À l’inverse, un analyste travaillant de manière autonome pourra plus facilement modeler son agenda à son rythme propre, en fonction de ses pics d’énergie au cours de la journée.
L’effort doit être réciproque et ne pas émaner seulement de la collaboratrice ou du collaborateur. L’organisation gagnerait en effet à se demander si le cadre qu’elle impose répond à ses besoins réels. Faut-il exiger de tout le monde une arrivée à 8h si l’équipe travaille de façon quasi autonome le reste de la journée ? À l’heure où la flexibilité est devenue une attente forte du marché du travail, se poser la question de la pertinence du cadre imposé révèle une vraie importance stratégique.
C’est là qu’intervient la notion de cercle d’influence : chacun peut agir à plusieurs niveaux. Sur soi-même, en clarifiant ses priorités et en apprenant à dire non. Sur son équipe, en fluidifiant la communication et en répartissant mieux les rôles. Et, plus largement, sur les processus collectifs, en simplifiant des flux d’information ou en proposant des améliorations concrètes.

LA QUESTION DES PENDULAIRES
Pour les pendulaires, la journée commence bien avant d’avoir franchi la porte de l’entreprise. Selon l’Office fédéral de la statistique, c’est d’ailleurs le lot commun de 8 travailleurs sur 10. Ils sont ainsi 70 % à exercer hors de leur commune d’origine, parcourent environ 14 km pour se rendre au travail et mettent environ 30 min depuis leur domicile. Mais il n’est pas rare de devoir passer une, deux heures, parfois plus dans les transports … Par choix ou nécessité.
Ce temps de transport peut-il être « optimisé » ? En théorie, oui, par exemple, en s’avançant sur la lecture des mails, ou bien en se détendant avec l’écoute d’un podcast… La confrontation au réel est néanmoins sans appel : les infrastructures saturées rendent le travail en mobilité de moins en moins confortable, même en première classe.
La période Covid a généralisé le télétravail et offert une alternative crédible. Pourtant, ses limites sont vite apparues : dilution du collectif, management à distance complexe, motivation en berne… D’où l’émergence actuelle d’un modèle hybride, avec un retour au bureau, parfois à marche forcée, et une diminution des jours de travail à domicile.

TEMPS PARTIEL : UNE FAUSSE BONNE IDÉE ?
Le temps partiel est souvent perçu comme un moyen pertinent de se réapproprier son temps… Et son rythme. Travailler à 60 %, 80 %, 90 %… Et dégager ainsi 3 à 4 jours pour soi. Sur le papier, la promesse semble séduisante… Mais la déception est malheureusement souvent au rendez-vous. Combien de managers à 80 % se retrouvent à assumer, dans les faits, l’équivalent d’un 100 % ? On cumule ainsi deux désavantages : une perte de revenu et une surcharge de travail. Avant de franchir le pas du temps partiel, il faudrait se poser deux questions : tout d’abord, pour quelles raisons ai-je besoin de moins travailler ? Pour des impératifs familiaux ? Pour développer une seconde activité professionnelle ? Pour m’investir dans un projet personnel ? Ensuite, est-ce que mon rôle peut réellement être assuré à temps partiel ? Certaines fonctions s’y prêtent, d’autres pas… Avoir une réponse claire à ces deux interrogations permet de mieux valider son choix et d’éviter moult déconvenues.
« JE N’AI PAS LE TEMPS »… VRAIMENT ?
Derrière la question du rythme, revient souvent la même complainte : « je n’ai pas le temps ». Mais le temps de quoi exactement ? Celui de réaliser ses projets, de voir ses amis, de pratiquer régulièrement du sport, ou simplement de garder une marge pour les imprévus ? Une manière plus pertinente de formuler la question serait de se demander « de combien de temps supplémentaire aurais-je besoin pour ne plus avoir l’impression d’en manquer ? ». Cette réflexion, simple en apparence, peut s’avérer un révélateur puissant. Souvent, on se rend compte qu’il ne s’agit pas forcément d’un nombre d’heures conséquent, mais que la problématique réside plus dans la disponibilité du temps, la possibilité d’en disposer de manière plus fluide. Pour mieux appréhender son besoin de temps et l’amorcer, nous avons listé une série d’autres questions à se poser.
- Pour quoi faire dois-je gagner du temps ?
- Quel(s) avantage(s) vais-je en tirer ?
- Combien de temps faut-il que je gagne ?
- D’ici à quand ?
- Qu’est-ce je dois mettre en place ?
- Comment m’y tenir (sur le long terme) ?
- Quelles sont les choses auxquelles je vais devoir renoncer ?
- Quelles compétences vais-je devoir mettre en œuvre pour y arriver ?
- Quelle valeur de mon organisation se manifeste dans cette prise de décision ?
NOS CONSEILS POUR GAGNER DU TEMPS
Quelques actions simples permettent déjà de dégager de l’air. La première étape, essentielle, est de prioriser. Apprendre à distinguer l’essentiel de l’accessoire, c’est accepter de renoncer à certaines tâches pour en mener d’autres jusqu’au bout.
Ensuite, il s’agit de mieux exploiter les outils à disposition – qu’il s’agisse d’outils numériques, d’automatisations ou même d’une utilisation plus réfléchie de l’IA. Dans bien des cas, ce n’est pas la charge de travail qui asphyxie, mais la manière dont elle est organisée.
Il faut aussi oser réviser les processus : simplifier les flux d’information, clarifier les responsabilités (qui fait quoi), déléguer ce qui peut l’être. Rester dans ses prérogatives n’est pas une démission mais une manière d’assurer son rôle avec plus d’efficacité.
Enfin, apprendre à dire non : à une réunion superflue, à une énième sollicitation. Dire non est un acte de courage managérial qui renforce la confiance mutuelle à long terme.
Tout cela suppose une bonne connaissance de soi : savoir ce qui nous draine, ce qui nous nourrit et où nous pouvons réellement changer nos habitudes. C’est avec cette nouvelle lucidité qu’un nouveau rythme peut s’installer.
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TO-DO LIST, TIME-BLOCKING, TASK BATCHING : DE QUOI ON PARLE ? En matière de gestion du temps, deux méthodes reviennent souvent : la to-do list et le time-blocking. La to-do list, ou la liste des choses à faire, a l’avantage de la simplicité : elle consiste à noter ses tâches et à les cocher une fois réalisées. Mais elle peut vite devenir un jour sans fin, chaque jour de plus en plus interminable. Le time-blocking, lui, consiste à planifier des plages horaires dédiées à une activité spécifique : traitement des suspens, travail de fond, réunion. Ce système se révèle particulièrement utile pour lutter contre la procrastination. Il oblige également à hiérarchiser et limite la tentation du multitâche. Il peut toutefois sembler rigide si les imprévus bousculent trop souvent l’emploi du temps. Une variante consiste à recourir au task batching, qui consiste à regrouper des tâches similaires dans une même session (par exemple, traiter tous les mails en une heure plutôt qu’en les éparpillant sur toute la journée). Ce système réduit les distractions et les changements de contexte, mais il exige des créneaux protégés et n’est pas adapté aux métiers où l’imprévu est constant. En pratique, beaucoup trouvent leur équilibre dans une combinaison des deux méthodes : utiliser le time-blocking pour structurer la journée et le batching pour gagner en efficacité sur des tâches récurrentes. |
Trouver son rythme est un travail au long cours, fait de réflexion, de bilans et d’ajustements réguliers. Il s’agit ici de prendre du temps pour en gagner par la suite. Mais l’enjeu est de taille : travailler au rythme qui nous correspond le mieux, c’est gagner en productivité et en efficience, mais aussi en motivation et en satisfaction… Un bénéfice tant pour l’individu que pour l’organisation.

